J’ai trouvé le père de mon futur enfant
Spontanée, sincère, généreuse, excessive parfois, elle donne tout d’elle-même.
Sans barrière ni fausse pudeur. Rencontre forcément intimiste avec celle qui est devenue la chanteuse
préférée des Français.
Ce soir-là, à Strasbourg, Lara Fabian s’apprête à chanter. Un concert à guichets
fermés, comme elle en a désormais l’habitude. Toute de noire vêtue, assumant avec humour ses
formes généreuses, la championne 1998 des ventes d’albums nous accueille dans la suite de son hôtel.
Chevelure solaire et sourire généreux, elle grignote une orangine au chocolat. Son péché
mignon. 'Vous en voulez une ?', propose-t-elle en riant.
L’ambition qui vous anime, d’où vient-elle ? D’une volonté d’être riche, aimée rassurée
?
Je pense à ce métier depuis que j’ai cinq ans. Toute petite, j’entendais deux notes de musique, et
je pouvais alors rester des heures à me balancer d’un pied sur l’autre. Je voulais être artiste et
je n’étais pas en âge d’y chercher des raisons.
Il paraît que vos parents ne vous quittent quasiment jamais. Difficulté de couper le cordon ?
Cela vient peut-être de mon sang sicilien, mais j’ai besoin de vivre en tribu. Une tribu d’une dizaine de
personnes, qui est la même depuis le début. Mon père, ma mère, mais aussi Rick, Lise
Richard, mon manager, François Blais, mon directeur de tournée, et deux ou trois autres proches.
On dit que c’est votre père, guitariste à ses heures, qui vous accompagnait à vos débuts,
dans les pianos-bars, et qu’il a cassé sa tirelire pour financer votre premier disque.
C’est vrai que, à 14 ans, j’étais un peu jeune pour aller chanter dans les pianos-bars. Alors, papa
m’y accompagnait... à la guitare ! Mais quand j’ai eu 20 ans, maiman et lui m’ont donné toutes leurs
économies pour que je puisse enregistrer. Un père, technicien en chauffage, qui a bossé dix-huit
heures par jour pendant vingt ans, et qui vous dit : 'Tu aurais été avocate, épicière
ou n’importe quoi d’autre, ça aurait été pareil. Tout ce qu’on a mis de côté,
c’était pour plus tard, pour toi, quand tu en aurais besoin '... ça fait chaud !
Votre voix, vous la considérez comme un don du ciel ou comme le fruit d’un long travail ?
Un don du ciel, bien sûr. A 5 ans, vous savez, je n’avais pas encore beaucoup étudié la technique
(sourire) ! Cela dit, il y a aussi une fierté, une énergie de travail qui permettent de sublimer
le cadeau initial.
L’amour est au coeur de vos nombreuses chansons. Dans Je t’aime, vous écrivez ' comme un homme que je
ne suis pas '. Pourquoi ?
J’ai un côté mec que j’assume. Et puis, je ne veux pas faire comme toutes ces femmes qui passent leur
temps à se plaindre. Moi, je n’ai pas peur de dire ce que je veux. Et quand on est comme ça avec
les hommes, non seulement la méthode leur paraît claire, mais, en plus, elle les éveille !
Votre album Pure racontait votre rupture avec Rick Allison, qui est toujours votre producteur. L’impudeur peut-elle
être une thérapie contre la souffrance ?
Elle l’a été contre la mienne. Disons que je me suis découverte. Mais la page est tournée.
Le prochain album sera tout aussi biographique, mais très différent. J’ai envie d’écrire sous
d’autres lumières que celles de mes blessures.
Peut-on tourner la page quand on écrit que ' la seule vérité, c’est d’être la femme
d’un seul homme pendant quarante ans et plus, si possible ' ?
La chance de cette vérité, c’est que je n’ai que 28 ans ! Je ne nie pas qu’il puisse y avoir une
marge entre la réalité et nos rêves de petite fille. Mais dans mes histoires d’amour, je ne
me suis pas trompée, car, si mes sentiments ont évolués, ils ne sont pas morts.
Mais, tout de même, pourquoi ce rêve d’un seul homme ?
Je suis issue de parents et de grand-parents très unis. Je sais que la terre bouge, mais une partie de mon
coeur croit encore au couple prédestiné. J’espère trouve en moi l’intelligence de parvenir
à faire durer l’amour envers et contre tout.
Pour vous plaire, il faut savoir dompter, apprivoiser ou se plier ?
J’ai horreur des rapports de force. Pour moi, un homme est magique : par l’enfant qu’il garde toujours en lui,
et par la force dont il peut faire preuve. Et puis, j’ai besoin d’intégrité et, surtout, qu’il me
fasse rire !
Les femmes rient plus souvent avec leurs copines qu’avec leurs amants, non ?
Les crises de rigolade avec les copines, ça m’arrive. Mais les plus gros fous rires de ma vie, je les dois
à Rick et à mon père.
Récemment, vous avez déclaré que vous feriez une pause dans votre métier à
32 ans, afin d’avoir un enfant. Vous programmez toujours tout ?
N’oubliez pas que j’ai été formée à Montréal, à l’école américaine,
et que je peux vous dire exactement ce que je ferai dans dix-huit mois !
Pour le bébé, cela peut paraître curieux, mais je me dis que dans quatre ans, il sera temps
de m’accomplir autrement. J’ai d’ailleurs déjà le sentiment que je vais avoir un fils. Je suis femme
avant d’être mère, mais j’ai le coeur qui vibre en pensant à tout cela.
Le père, vous pensez que vous l’aurez trouvé ?
Je ne pense pas, j’en suis sûre.
Alors, vous l’avez déjà trouvé ?
Je crois.
On dit que vous seriez très amoureuse de Patrick Fiori, qui campe Phoebus dans Notre-Dame de Paris. Vous
confirmez ?
Je ne confirme pas, car je n’en parle pas. Mais je ne nie pas non plus...
Alain Morel
© Allo ! 10 Décembre 1998