LARA FABIAN
"Je réalise le rêve de mes 8 ans..."
La belle chanteuse nous revient avec un album en anglais digne des plus grands...
On se demandait tous à quoi allait ressembler le premier album de Lara en anglais... Eh bien, dès
la première écoute, on retrouve sa voix, son émotion et la magie de son univers musical qui
nous avaient conquis. Entourée des plus grands réalisateurs (ceux de Madonna, Mariah Carey, Barbra
Streisand...), la voilà partie à la conquête de l'Amérique. Mais, fidèle à
ses premiers fans, elle vous livre avant tout le monde ses impressions sur cette fabuleuse aventure...
La confection de cet album a-t-elle été difficile ?
Cela a été un travail de deux ans. Après chaque voyage en France, même si je faisais
une télé où plein de fans m'attendaient, je retournais ensuite dans un studio new-yorkais
où personne ne me connaissait. Je me replongeais dans un travail de création et de remise en question.
C'était extraordinaire, parce que ça remettait les pendules à l'heure, augmentait mon besoin
de me dépasser et de convaincre.
As-tu parfois eu peur de ne pas être à la hauteur ?
Oui. Il y a eu des rires, mais des larmes aussi, des moments où je me retrouvais avec les plus grands ingénieurs
et producteurs du monde, dans les plus grands studios, et je me disais : "Si moi, j'assure pas, qu'est-ce
qui va m'arriver ?". Alors, au lieu d'essayer de devenir autre chose que ce que je suis, j'ai décidée
de me rester fidèle. Sur douze chansons, j'en ai écrit neuf, paroles et musique, en collaboration
avec ces géants.
Comment t'ont-ils accueillie ?
Merveilleusement. Ils semblaient "rafraîchis" par le fait que je n'étais personne pour eux.
Même si, pour moi, ce que j'ai fait en français est immense, que ça représente dix ans
de travail, pour les Américains, ça ne veut rien dire ! Ils étaient très à mon
écoute...
T'es-tu parfois demandé ce qu'il t'avait pris de t'embarquer dans une telle aventure alors que tu avais
déjà un succès fou ici ?
Jamais ! La source de cette ambition internationale, cette volonté de travailler avec ces grands datent
de vingt ans. J'avais 8 ans que je regardais les yeux écarquillés Barbra Streisand en me disant :
"Moi aussi, un jour, je travaillerai avec tous ces gens." Alors, au moment où j'ai mis les pieds
dans cette arène, j'ai pensé : "Enfin ! Maintenant tiens-toi droite, respire et vois si tu es
à la hauteur de tout ce que tu as espéré". Je suis convaincue que, lorsqu'on croit en
soi, on trouve toujours la force. J'ai le culte du "tout est possible si on travaille dur" !
On sent vocalement une infinie douceur dans cet album, comme si ta rage s'était estompée...
Sans doute parce que je suis plus épanouie et que j'ai un besoin moins urgent de prouver quelque chose.
C'est un album d'harmonie aussi parce que j'ai fait la paix avec beaucoup de chose...
Il parle beaucoup d'amour également...
Je le dis souvent : je suis une incurable amoureuse ! (Sourire). Je chante et j'écris l'amour parce que
c'est la quête de tout le monde. Certains la disent, et d'autres la taisent... Et puis c'est une sujet qu'on
peut décliner à l'infini...
Quand tu as besoin d'un avis objectif sur tes chansons, vers qui te tournes-tu ?
En dehors de Rick Allison (son complice musical), j'écoute énormément ma mère, parce
que lorsqu'il y a un vrai truc qui passe, elle le ressent immédiatement. Et comme elle me voit toujours
comme sa petite fille et pas comme une artiste, elle a une opinion incroyablement juste. Ma mère est une
référence pour moi parce qu'elle est sans artifices et qu'elle n'est pas ma plus grande fan. Ma mère
est ma mère, tout simplement...
Tes parents t'ont-ils rejointe en studio ?
Souvent. A New York pour l'enregistrement de Broken Vow, par exemple. Je devais chanter en live au studio Hit Factory,
avec l'orchestre philarmonique de New York. C'était surréaliste. J'étais toute petite, habillée
de blanc au milieu de ces 100 musiciens. J'étais tétanisée... En même temps, ça
m'a portée, et j'ai chanté cette chanson d'un trait, comme on l'entend sur le disque. A ce moment-là,
mes parents étaient à la console, et quand je me suis retournée, j'ai vu des larmes dans les
yeux de mon père. Plus tard, il m'a dit que c'était ce qu'il avait entendu de moi de plus touchant.
Patrick (Fiori, bien sûr) est venu également ?
Oui, deux-trois fois...
Et quel a été sa réaction en écoutant ?
Comme il est corse et très entier, la première fois que je lui ai fait écouter Broken Vow,
par exemple, il m'a dit : "C'est une tuerie, c'est grandiose, vraiment je n'ai pas d'autres mots !" (Elle
dit ça avec l'accent en l'imitant et elle éclate de rire). Puis je l'ai surpris deux-trois fois en
train d'écouter seul la chanson... Il m'a dit qu'il était fier de moi.. .Souvent, l'exubérance
de ses sentiments me désarme, moi qui ai parfois du mal à dire les choses si simplement...
Que faisais-tu à New York ou à Los Angeles lorsque tu sortais du studio ?
J'étais tout le temps avec mon équipe. J'ai même vécu chez certains réalisateurs,
comme Walter Afanasieff ou Pat Leonard. Alors on allait chercher leurs gosses à l'école, je les aidais
à faire leurs devoirs de français, je cuisinais pour la petite famille...
Qu'aimes-tu dans la culture américaine ?
Chez les gens, j'aime leur côté allumé, cette lumière qui vient de la force de réussir.
L'Américain est un adolescent qui a grandi trop vite... Côté pratique, j'aime la surdimension
des choses. Les gratte-ciel où on monte 117 étages en quinze secondes, mais où le hamburger
qu'on mange peut être totalement infect. C'est le paradoxe !
As-tu rencontré des stars ?
J'ai croisé Tom Cruise et Nicole Kidmann au supermarché Pavillon, à 22 heures 30. J'ai vu
Sharon Stone avec 18 sacs de chez Gap grimper dans une voiture qu'elle conduisait elle-même. J'aime le côté
naturel des stars. Là-bas, il est possible d'être un mythe et de continuer à vivre normalement.
Et moi, ça me plait, parce que j'aime la vie. A Paris, je fais mes courses comme tout le monde au Monoprix,
sans lunettes noires, parce que c'est trois fois plus voyant. Les gens sont adorables et discrets avec moi. Mais,
bien sûr, j'évite la cohue du samedi après-midi. Normal ! (Sourire).
Propos recueillis par Nicole
© Salut N° 57 - Novembre 1999