LARA FABIAN,
"Je rêve de me marier"
Epanouie, amoureuse et heureuse ! Lara Fabian est de retour sereine et conquérante, avec un nouvel album
éponyme et en anglais. Prête à séduire le monde entier, elle a tenu à passer
d'abord par la France pour parler du nouveau tournant de sa carrière... et de sa vie !
Dans ce nouvel album, tu as une image plus douce. C'est voulu ?
Tu me vois plus douce parce que ça fait deux ans que je défends mes chansons à la télévision
et en spectacle. Quand tu mets ton album en image, tu donnes tout au public, toute l'énergie que tu as en
toi. Mais effectivement, dans cet album, il y a beaucoup de retenue. Si tu veux qu'un album fasse partie de la
collection des albums aimés d'un public, il faut que tu distilles les choses. Que tu sois capable de donner
plus ou différemment sur scène.
Le fait que tu chantes en anglais permet de te comparer avec les "voix" du moment, Dion, Houston,
Carey... C'est une manière de confirmer que tu en fais partie ?
Faire partie de ce cercle de chanteuses à voix, c'est ce que j'ai toujours souhaité. J'ai toujours
eu ce rêve. Je me rappelle qu'à l'âge de six ans, je regardais Barbra Streisand à la
télé la bouche ouverte et je me disais "moi aussi je veux ça", sans même comprendre
les conséquences que sont la gloire, le fric, le succès et, en même temps, ce sentiment d'appartenir
à ton public, de devoir préserver à tout prix un peu de ta vie privée.
Justement, on peut dire que ta vie privée a été l'objet de bien des articles cette année.
Alors que toi, tu en parlais très peu.
J'ai été très discrète sur mon histoire d'amour avec Patrick Fiori. J'ai essayé
de détourner les choses parce que j'ai jugé que ça n'était pas opportun, au stade où
j'en étais de notre relation. Elle n'était pas encore suffisamment solide au moment où on
me posait des questions. Je ne voulais pas dire "Oh là là ! c'est l'homme de ma vie...".
Pourtant, tu as dit "Je crois que j'ai trouvé le père de mes enfants"...
On me l'a fait dire. Et j'ai espéré que Patrick ne lise pas ça. J'avais peur qu'il prenne
la poudre d'escampette en disant "Mais je ne lui ai jamais parlé de gosses, qu'est-ce que c'est que
ces conneries ?" Et puis, j'ai laissé faire... Les médias m'ont mariée, divorcée,
fait des enfants...
J'espère que tu as reçu le carton d'invitation...
Non, et toi ?
(Elle rigole)
Et aujourd'hui ?
Ca n'est pas pareil ! Aujourd'hui, je peux parce que notre histoire dure depuis plus d'un an. C'est forcément
l'une des plus belles histoires de ma vie parce qu'elle m'apporte stabilité et harmonie. A travers les yeux
de quelqu'un qui te dit que tu es la plus belle femme du monde, la plus intéressante, un ange... Ca n'est
pas que tu le crois, parce qu'il faut garder un peu de lucidité, mais ça rassure !
Tu parles d'amour avec gourmandise, tu rêves d'absolu... Pourquoi cultives-tu ce côté éphémère
de l'amour ?
C'est pour contrer mon insécurité. Je veux croire profondément à l'éternité
de l'amour, au sublime, et j'ai tellement peur de l'anéantir que je vais prôner l'inverse. Mais au
fond de mon ventre, je me dis "si ça pouvait être le bon..."
Tu fais partie de ces femmes qui préfèrent rester maîtresses pour cultiver l'amour ?
Oui, et en même temps je rêve de me marier.
Et avoir trois enfants...
Deux et un cadeau si le ciel le veut. Mais je me donne trois ou quatre ans pour ça. Je vais travailler,
et prendre le temps de vivre. Heureusement, j'ai de vraies plages de temps pour ma vie privée. Et j'ai même
des soirées à moi. On ne me demande pas où je vais, qui je vois.
A planifier tes enfants et ta carrière, tu n'as pas peur que l'on te reproche d'en faire trop ?
J'ai l'exubérance des gens qui donnent. Je sais qu'être entière ne plaît pas à
tout le monde. Mais c'est mon côté rital. Mais je suis à un stade de ma vie, à l'aube
de mes trente ans, où j'ai l'impression que je me suis réconciliée avec tout ce qu'une femme
peut avoir comme angoisses et une artiste peut ressentir comme insécurité. J'ai besoin de dire "je
t'aime" et besoin d'être aimée. Et en même temps, je dis volontiers que l'amour doit se
cultiver. Rien n'est jamais acquis.
Pourtant, tu as fait ton chemin depuis l'Eurovision en 1988, l'année où Céline Dion a gagné.
Est-ce que vous vous étiez remarquées à cette époque ?
J'aime Dion depuis l'âge de douze ans. Depuis "Mon ami m'a quitté". Mais tu n'as pas vraiment
le droit de le dire quand les gens t'affrontent en permanence. D'emblée, ils te mettent en concurrence.
En coulisses, cette année-là, on s'est beaucoup parlé. Chaque fois qu'elle m'entendait chanter,
elle me faisait un signe du pouce. C'est une vraie artiste qui n'a jamais rien eu à prouver aux autres mais
à elle-même.
On va dire que tu la suis à la trace ! Cet album, c'est un risque, un défi, une nécessité
?
C'est la suite, et il y en aura d'autres.
Tu nous abandonnes ? Il n'y aura plus d'albums en français ?
Pas du tout ! Mon prochain album en français est déjà presque tout écrit. Et j'ai choisi
de venir trois mois en France, avant de faire quoi que ce soit d'autre. Quand tu donnes deux ans de ta vie à
un pays, tu ne peux pas ensuite lui donner seulement deux jours. La sortie internationale commence par la France
fin novembre et pas avant février 2000 aux USA.
Tu ne vas donc pas arrêter ?
Je vais faire dix-huit mois de promo partout dans le monde. C'est génial parce que ça me permet de
parler de quelque chose que j'ai vécu pendant deux ans. Deux années à rire, crier, pleurer
à en mourir, à vivre tous les sentiments existants. Et j'ai tellement appris, j'ai tellement grandi.
Mais je ne suis pas revenue en Américaine !
Pourtant, l'album est américain...
Je n'ai pas fait cet album pour les Américains mais pour passer à la radio à Madrid, être
écoutée à Pékin. Et si un jour je fais un prime time sur la RAI et que toute ma famille
italienne peut me voir, j'en serai très fière.
Mais quand même, le marché américain...
Aussi. C'est un lancement international, donc le marché américain est important également.
Mais même si l'album a été enregistré et produit aux Etats-Unis, ils m'ont donné
une liberté absolue, en me rappelant "n'oublie pas qui tu es". Et il n'y a rien que j'aie fait
que je n'aie pas eu envie de faire.
Malgré tout, est-ce que tu t'es "américanisée" ?
Ils ont essayé. Nous avons même fait une séance photos avec des extensions dans les cheveux,
des ongles longs comme ça (elle fait le geste). Et quand ma mère a vu les photos, elle m'a dit "oh
que c'est joli, c'est qui ?". Alors j'ai dit non ! Je me suis battue pour rester moi-même. J'ai appris
avec le temps que la comparaison ne menait à rien. Avant, j'étais la vraie nana avec les critiques
habituelles, sur les fringues par exemple. Mais à côté de Claudia Schiffer qui fait 2,25 mètres,
je suis un Schtroumpf ! Alors, je crois que quand tu as trouvé ta voie ou ton style, il faut courir dans
ton couloir pour aller le plus loin possible.
Propos recueillis par Nathalie Crespeau
© Télé Club Plus (France) - Novembre 1999 N° 87